Bassamat & Laraqui

Revenus fonciers, l’amnistie cachée

Le projet de loi de finances accorde aux bailleurs en situation fiscale irrégulière la possibilité de se conformer en matière de revenus fonciers. C’est l’autre amnistie fiscale sur laquelle le ministre des Finances n’insiste pas trop. Elle concerne bien entendu uniquement les personnes physiques.

Le deal est le suivant: le contribuable paierait une contribution libératoire de 10%. Si vous êtes concernés, vous ajouterez cette contribution à votre déclaration de revenus de 2019. Ainsi, la personne qui loue un bien immeuble à 5.000 DH par mois, par exemple, soit 60.000 DH par an, devra accompagner sa déclaration d’un paiement de 6.000 DH. Les revenus fonciers bruts inférieurs à 30.000 DH par an sont exonérés d’impôt.

Le barème exceptionnel ou de droit commun ne prévoit pas de déduction des charges fiscales (taxe d’habitation, TSC) ni des frais d’entretien. En contrepartie, la personne est exemptée du paiement de l’impôt sur le revenu au titre des années non prescrites. A signaler qu’en cas de non-déclaration d’un impôt, la prescription est de 10 ans.

Le gouvernement propose également l’annulation d’office des majorations, amendes et pénalités. Les personnes qui choisissent de ne pas souscrire à cette mesure avant le 1er juillet 2020 restent soumises au droit commun. La mesure est en principe transitoire. C’est donc la dernière chance pour sortir de l’informel et de régulariser sa situation.

Plusieurs milliers de personnes et ménages louent des biens immeubles sans effectuer de déclaration au fisc. Les raisons sont multiples. Il y a d’abord ceux qui refusent de payer l’impôt comme dans beaucoup de secteurs tels que le bâtiment, le commerce de détail, certaines professions libérales…

Mais il y a d’autres qui doivent certainement être nombreux qui souhaitent déclarer leurs revenus, mais le régime fiscal n’est pas favorable. En effet, lorsqu’un bailleur loue un appartement meublé, le cas de Airbnb (très nombreux), il devient assujetti à l’impôt sur les revenus professionnels et non plus fonciers. La différence est de taille: dans le premier cas, le bailleur est soumis à l’IR selon une grille progressive dont le taux marginal est de 38%.

A cela s’ajoute une TVA à 20% parce qu’il s’agit d’un local meublé ainsi que la taxe professionnelle. Dans le cas des revenus fonciers, l’impôt est de 10% jusqu’à 10.000 DH bruts par mois et de 15% au-delà. Cette pression fiscale dissuaderait les partenaires d’Airbnb de sortir du noir.

«Nous constatons chaque jour des milliers de touristes qui débarquent à Marrakech, mais cela ne se traduit pas par un accroissement des nuitées dans les hôtels. Bon nombre de ces touristes sont hébergés selon la formule Airbnb dans des appartements ou des riads. D’où une concurrence déloyale pour les hôtels», explique un conseiller.

Ce système d’hébergement de courte durée constitue donc un gisement de recettes fiscales négligé. A noter que l’administration fiscale ne procède plus au recensement des biens immeubles pour identifier ceux qui font l’objet d’une location et n’en a plus les moyens vu la taille du parc de locaux qui se comptent par millions.

Par conséquent, le législateur devrait alléger le régime fiscal de la location pour habitation, en requalifiant les revenus professionnels en revenus fonciers afin d’inciter les bailleurs à se conformer.

«Le projet de loi de finances n’a pas prévu le cas des personnes qui louent plusieurs biens immeubles, mais qui ne les déclarent pas tous. Bénéficiera-t-elle de l’amnistie parce qu’elle a sous-déclaré?», s’interroge un expert-comptable. Une question qui devra trouver une réponse dans le cadre des débats au Parlement.

Par : Hassan EL ARIF

La réforme de la justice au cœur du partenariat entre le Maroc et l’Union européenne

Débattue à l’origine en tant qu’idée ou vertu, la justice a été, depuis l’aube des temps, traitée par les plus grands philosophes et les plus grands écrivains. Ces réflexions se sont, au cours des siècles, concrétisées par la rationalisation des concepts de justice et de ce qu’ils pouvaient représenter d’une part pour  l’Etat, soucieux de lutter contre la criminalité à divers degrés et de faire  respecter les lois, et d’autre part pour les citoyens, comptant s’assurer  du respect de leurs droits et de l’établissement d’une égalité véritable et anonyme devant la justice.

Au sein de l’Union européenne, la justice est au centre des traités et de la Charte des droits fondamentaux. Ainsi, les citoyens européens jouissent d’un grand nombre de droits, libertés et protections, dont par exemple des droits personnels, civils, politiques, économiques et sociaux, la protection de leurs données à caractère personnel,  et une législation anti-discrimination, qui ont été définis et se sont affirmés au cours des décennies pour répondre à leurs attentes.

Cependant la justice est souvent qualifiée d’imparfaite et demeure au cœur des débats de  toutes les sociétés. Pour rendre le meilleur service possible aux citoyens, elle est amenée, de par l’évolution du monde, à se renforcer, s’adapter, se transformer et progresser. C’est dans ce contexte d’évolution et  de modernisation que le Royaume du Maroc a initié, sous l’impulsion du  Roi Mohammed VI, une vaste réforme de la justice, accompagnée par l’Union européenne depuis 2015. L’Etat marocain, depuis la Constitution de 2011, a redéfini ses missions; les services publics se modernisent. Et celui de la Justice n’échappe pas à ces mutations.

Le soutien de l’UE mené de concert avec les autorités marocaines cible quatre secteurs d’intervention: la consolidation de l’indépendance du pouvoir judiciaire,  le renforcement  de l’accès au droit et à la justice, de la protection judiciaire des droits et des libertés, l’amélioration de l’efficience et de l’efficacité de la justice, et, de manière complémentaire et coordonnée, la modernisation de l’administration pénitentiaire et les politiques de réinsertion sociale des détenus(es).

La bonne gouvernance est le pilier d’une administration qui fonctionne bien. Le Maroc dans sa volonté de réforme a mis l’accent sur la séparation entre les pouvoirs exécutifs et judiciaires en créant récemment deux nouvelles institutions indépendantes du ministère de la Justice: le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire et la présidence du ministère public.

La création de ces deux institutions est une avancée très importante pour le Maroc afin de renforcer l’indépendance des magistrats, du pouvoir judiciaire et des procureurs vis-à-vis du pouvoir politique. Ce changement institutionnel n’est pas encore nécessairement perceptible par les justiciables, mais il introduit pourtant de nouvelles garanties d’indépendance constitutionnelle fondamentales.

Dans le cadre de ce programme, nous travaillons aussi avec les autorités marocaines sur des réformes concrètes et avons atteint des résultats tangibles pour faciliter l’accès au fonds d’entraide familiale destiné aux femmes vulnérables et leurs enfants, renforcer les capacités des magistrats en accompagnant la réforme de leur enseignement, réduire les délais d’exécution des décisions de justice, et pour renforcer l’efficacité.

«La justice est l’une des clés essentielles pour fortifier le climat des affaires, promouvoir la liberté d’entreprendre et protégrer l’entreprise», avait notamment souligné la lettre royale adressée aux participants de la 2e Conférence internationale de la justice qui s’est tenue les 21 et 22 octobre derniers à Marrakech (Ph. L’Economiste)

Renforcer les capacités des institutions et des individus qui les font fonctionner

Un de nos instruments les plus efficaces pour partager nos bonnes pratiques européennes tout en s’inspirant de l’Acquis communautaire est le jumelage institutionnel que nous utilisons actuellement entre l’Institut supérieur de la magistrature et trois écoles européennes de la magistrature. Ce jumelage, que nous clôturons aujourd’hui, a bénéficié de l’expertise européenne pour accompagner la réforme de l’Institut en termes de gouvernance, de formation et de communication. Un autre jumelage, en cours, avec le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire vise à renforcer ses capacités institutionnelles managériales et organisationnelles. Dans le même esprit, un prochain jumelage est prévu avec la présidence du ministère public. Une assistance technique est également déployée auprès des 3 institutions judiciaires du Royaume pour travailler sur nombre de domaines visant à renforcer les capacités des institutions et des individus qui les font fonctionner.

La justice fait intervenir plusieurs acteurs: l’Institution mais aussi les justiciables. La citoyenne ou le citoyen doivent se sentir protégés, écoutés, pris en considération par leur justice. La justice sera plus crédible si elle est rendue avant tout compréhensible pour les citoyens et si elle apporte des solutions perçues comme justes en temps utile aux problèmes quotidiens qu’ils rencontrent.

La justice touche à tous les segments de la société. Elle concerne également les investisseurs qui, pour se développer, doivent pouvoir trouver dans les pays qui les reçoivent un environnement juridique propice à la bonne marche de leurs affaires. La 2e Conférence internationale de la justice des 21 et 22 octobre derniers à Marrakech, à laquelle nous avons participé, a d’ailleurs mis l’accent sur le lien entre Justice et Investissement: en effet, une justice efficace et indépendante ne peut que rassurer les investisseurs potentiels et les inciter à s’établir durablement au Maroc, en devenant un moteur de croissance et de création d’emplois.

Avec un encours de plus de 18 milliards d’euros d’investissements directs européens au Royaume, les entreprises européennes sont très sensibles aux thématiques de la réforme de la justice commerciale et de l’amélioration du climat des affaires.

L’Union européenne, à travers le programme d’appui à la compétitivité et à la croissance verte, soutient  les stratégies nationales d’accélération industrielle, de commerce extérieur et de développement durable pour la transition vers une économie plus verte. Ces stratégies incluent elles-mêmes plusieurs mesures concourant à l’amélioration de l’environnement des affaires au Maroc.

La justice touche à tous les segments de la société. Depuis la Constitution de 2011, le Maroc a redéfini ses missions; les services publics se modernisent. Et celui de la justice n’échappe pas à ces mutations (Ph. L’Economiste)

Soutien au programme de réforme pénitentiaire

Quand on parle de justice, on pense évidemment aux verdicts et aux emprisonnements qui parfois en découlent. Et c’est dans un souci de continuité et de cohérence que l’Union européenne soutient également le programme de réforme pénitentiaire au Maroc. Nous dialoguons avec les autorités marocaines depuis plusieurs années pour encourager la réforme pénale, et l’utilisation des  peines alternatives à l’emprisonnement, entre autres, pour agir sur la surpopulation carcérale qui est un vrai défi pour le Maroc. La Constitution de 2011 contient un ensemble de dispositions relatives au traitement et à la protection des droits des détenus et inclut le régime pénitentiaire dans les attributions législatives dévolues au Parlement.

La charte de la réforme du système judiciaire confirme la réforme de la justice en tant que priorité du programme gouvernemental et prévoit, entre autres, le renforcement de la protection judiciaire des droits et libertés liée à la révision de la politique pénale et la réforme de la politique d’incrimination.

La Délégation générale à l’administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR)  est en train de développer une stratégie que l’UE appuie, et qui prévoit l’humanisation des conditions de détention, la sécurité des personnes, l’habilitation des détenus pour la réinsertion, la modernisation de l’administration et le renforcement des mesures de gouvernance. Un jumelage est ici aussi également à l’œuvre entre la DGAPR et  des institutions homologues européennes.

La peine de mort est absente des verdicts des tribunaux européens, car son abolition est une condition sine qua non pour qu’un Etat puisse être membre de l’Union européenne.  En 2018, le nombre d’exécutions à travers le monde a baissé de 31%, ce dont nous pouvons nous réjouir. L’Union européenne soutient toutes les démarches et les initiatives dans le monde pour arriver à une abolition globale et universelle, y compris dans l’enceinte des Nations unies. Fort du moratoire de fait qu’il applique depuis 1993, le Maroc constitue aux yeux de l’Union européenne un partenaire important pour avancer sur le chemin de l’abolition universelle de la peine de mort.

L’Union européenne accompagne dans leurs travaux de plaidoyers le collectif «Ensemble contre la peine de mort», dont les acteurs locaux au Maroc sont représentés par l’Organisation marocaine des droits humains,  le Conseil national des droits de l’Homme, la Coalition marocaine contre la peine de mort et le Réseau des parlementaires marocains contre la peine de mort.

Les tâches qui incombent à tous les acteurs du système judiciaire sont nombreuses et très importantes. Leur rôle est central et crucial dans la mise en place d’un Etat de droit et la promotion d’une justice efficace et humaine: une justice qui permette la réalisation des droits consacrés par la Constitution de 2011, mais également la réalisation des droits découlant des engagements internationaux du Royaume.

Egalité de droits

Les justiciables, qu’ils soient plaideurs ou accusés, doivent pouvoir compter sur une égalité de droits quand ils ont à faire aux tribunaux. C’est pour cette raison qu’à travers nos différents projets nous soutenons les enfants, les femmes et les hommes qui font face à un procès ou une action en justice, pour qu’ils puissent avoir facilement accès à l’équité en usant de leurs droits fondamentaux.

A travers l’appui de l’UE à la réforme du secteur de la justice au Maroc, le projet «Himaya», mis en œuvre par l’Unicef, tend à renforcer le dispositif de protection des enfants en contact ou en conflit avec la loi et la prise en compte de leur intérêt supérieur.

Plusieurs sujets dans le domaine de la protection des enfants, comme la protection accrue des enfants dans le cadre de la Kafala, des enfants dans les centres de sauvegarde, le développement des familles d’accueil sont abordés dans le cadre de ce projet pour aider à former, réformer, faire évoluer ces sujets.

Dans son sillage,  le projet «Himaya wa Hijra» s’adresse aux mineurs migrants, via l’appui de l’UE à la stratégie nationale d’immigration et d’asile du Maroc afin que les droits de ces enfants sur le territoire marocain soient appliqués.  Les femmes sont également au centre de nos préoccupations: ainsi nous accompagnons le secteur de la justice dans le cadre de l’application effective des droits prévus dans le code de la famille (fonds d’entraide familiale, lutte contre le mariage des mineurs, opérationnalisation des sections de la justice et de la famille dans les tribunaux) . Nous appuyons également la lutte contre la violence faite aux femmes à travers les 4 piliers que sont la prévention, la protection, la prise en charge des victimes et la poursuite judiciaire.

Par: Claudia WIEDEY

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Sûretés mobilières : un outil innovant bientôt mis en place

Avec l’opérationnalisation imminente du registre national électronique des nantissements, partie intrinsèque du vaste chantier de réforme du système des sûretés mobilières, le Maroc marque un grand pas vers l’amélioration des conditions d’accès au financement pour les entreprises et par conséquent la promotion des investissements.

A travers cette réforme, qui compte beaucoup pour les entreprises et plus particulièrement les Petites et moyennes (PME), le Maroc a souhaité promouvoir un régime juridique moderne des sûretés mobilières, favoriser l’accès au crédit mais aussi et surtout mettre en place un registre national électronique des sûretés mobilières, un mécanisme tant scruté pas les investisseurs s’inscrivant dans le cadre de la mise en œuvre de loi relative aux sûretés mobilières.

Cet outil innovant, dont la mise en place est prévue dès début 2020 est l’aboutissement de ce grand chantier de réforme des sûretés mobilières. C’est alors une bonne nouvelle aussi bien pour les créanciers, puisqu’il devrait apporter son lot d’avantages en matière de transparence sur les inscriptions faites sur le bien mobilier donné en garantie.

Pour Mohamed Chater, professeur de l’enseignement supérieur à l’Institut national de statistique et d’économie appliquée (INSEA), ce registre devrait “assainir la confrontation entre entreprises et banques en ce qui concerne la relation financière. Ce changement, s’il s’opère dans la confiance et la conclusion de partenariats, déboucherait à coup sûr sur une dynamisation de la croissance de l’économie marocaine”.

Dans une déclaration à la MAP, M. Chater a fait observer que la réforme du système des sûretés mobilières est “incontournable” pour promouvoir l’accès au financement en faveur des entreprises et les PME, étant donné, a-t-il expliqué, que “leurs actifs à la fois corporels et incorporels peuvent être utilisés comme outils de garantie pour l’obtention de prêts”.

C’est pour cette raison que la réforme du droit des sûretés mobilières doit avoir “des modes exécutoires qui soient rapides et efficaces”, a souligné l’expert.

En effet, le Comité national de l’environnement des affaires (CNEA), a annoncé la mise en application de ce registre des nantissements “dès janvier ou février 2020”, afin de pouvoir “faciliter la tâche à l’ensemble des établissements de crédit pour offrir plus de financements, en contrepartie de garanties aussi bien mobilières qu’immobilières”.

Son coordonnateur, Thami El Maaroufi, qui s’exprimait lors d’une conférence de presse à l’occasion de la publication du rapport Doing Business 2020 de la Banque mondiale, a précisé que ce nouveau dispositif, auquel s’attelle toute une équipe représentant l’ensemble des parties concernées, “va révolutionner l’octroi de crédit au Maroc pour les entreprises”.

Mis en place notamment par le ministre de la justice en collaboration avec le ministère de l’économie et la banque centrale, ce mécanisme devrait constituer “un potentiel pour améliorer encore davantage le climat des affaires du Maroc”, a ajouté M. El Maaroufi.

En effet, le Royaume a marqué un bond soutenu dans le classement Doing Business de la Banque mondiale, passant ainsi de la 128ème place en 2010 à la 53ème position dans l’édition 2020 de ce rapport qui représente un baromètre du climat des affaires et un outil de benchmark au niveau international.

Dans cette optique, le Maroc a inscrit la réforme du système des sûretés mobilières au rang de ses chantiers prioritaires. Chose dite, chose faite, en avril dernier, la loi N 21-18 relative aux sûretés mobilières a été adoptée et publiée au Bulletin officiel. Parmi ses principales dispositions, l’élargissement du champ d’application des sûretés mobilières mais également la mise en place du registre national électronique des sûretés mobilières.

D’après une analyse fournie par le CNEA, ce texte, accompagné par la mise en place effective de ce registre national des nantissements, aura un impact systématique sur le classement du Maroc dans le rapport Doing Business, d’autant plus que le Maroc aspire à se hisser au top 50 des économies les plus grandes de l’indice Doing Business à l’horizon 2021.

“Une amélioration au niveau de l’obtention de prêts est attendue dans les prochaines éditions du rapport grâce à l’adoption de la loi des sûretés mobilières au Maroc ainsi que la mise en place du registre national électronique des sûretés mobilières”, estime encore le CNEA.

Grâce à cette réforme, et bien d’autres, qui s’est traduite notamment par la publication de la loi relative aux sûretés mobilières, et prochainement la mise en place du registre national électronique des sûretés mobilières, le Maroc est sur la bonne voie pour rénover l’accès au financement, encourager l’investissement et, in fine, créer un environnement favorable aux affaires.

 

Par : Safae BENNOUR

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Saisies des biens de l’Etat : L’exécutif veut faire marche arrière

A peine née, la polémique autour du dispositif 9 du projet de loi de Finances stipulant l’impossibilité de saisir les biens de l’Etat, même après prononciation d’un jugement, prend déjà fin. En effet, le gouvernement a décidé de revenir sur cet article tant décrié par le corps des avocats et des magistrats.

Citant une source gouvernementale, Al Ahdath nous apprend, dans sa livraison du mercredi 30 octobre, que le gouvernement a décidé de faire marche arrière, et ce peu avant de recevoir les amendements proposés par les différents groupes parlementaires à la Chambre des représentants. Lesquels amendements seront discutés au cours de cette même semaine.

Le ministre d’Etat en charge des droits de l’Homme, Mustapha Ramid, avait d’ailleurs avoué que cette disposition était une «erreur» et que la question méritait d’être traitée «de manière globale». Cette mesure, expliquait par ailleurs Mohamed Benchaâboun, se justifiait par le coût exorbitant que représentent ces saisies pour l’Etat. «Et ce dernier ne peut plus supporter ce dont il a dû s’acquitter au cours des trois dernières années», a-t-il affirmé lors d’une conférence de presse. «Il y va de la préservation des équilibres financiers de l’Etat», a-t-il ajouté.

On s’en souvient, cette mesure a récemment suscité l’ire des avocats du Maroc. Dans une lettre envoyée à l’ensemble des avocats du pays et adressée, également, à l’opinion publique, les anciens présidents des barreaux du Maroc ont dénoncé la «manipulation» dont les jugements précités font l’objet, rapportait Al Massae dans son édition du mercredi 23 octobre. Ils ont insisté sur la nécessité, pour les avocats, de réagir pour défendre les verdicts prononcés contre l’Administration, quand celle-ci cherche à les esquiver. «Et ce, contre le principe constitutionnel voulant que tout jugement soit exécuté», lisait-on dans le quotidien.

Ils ont précisé, par ailleurs, que la procédure d’exécution des jugements avait accordé à la justice, exceptionnellement et à titre exclusif, la latitude de stopper ou reporter une exécution donnée. Les protestataires exprimaient ainsi leur rejet total de la disposition figurant dans le PLF 2020 et supposent que l’Administration peut aussi faire valoir cette prérogative.

«Une telle mesure apportera un coup fatal à la crédibilité et à l’indépendance de la Justice et causera un préjudice énorme à l’Etat de droit. Tout comme elle entamera sérieusement la confiance des justiciables et des avocats quant à la viabilité des jugements prononcés», a dénoncé la profession.

A rappeler que la même disposition figurait dans l’article 8 du projet de loi de Finances de l’année dernière. Mais, suite à la pression exercée par les avocats, elle n’était pas passée au Parlement, indique le quotidien.

 

Par : Maya Zidoune

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Mariage des mineurs : Abdennabaoui veut en finir avec le contournement de la loi

Le phénomène du mariage des mineures est toujours présent malgré les initiatives visant à les réduire. La justice et les familles profitent des quelques failles qui existent dans les textes pour autoriser les mariages de personnes mineures. Ainsi, en 2018, 32.104 demandes de mariage d’enfants ont été enregistrées, contre 30.312 en 2006, malgré le Code de la famille. Ces chiffres n’intègrent pas les mariages par “Al-Fatiha”. Pour lutter contre ce phénomène, le procureur général du Roi près la Cour de Cassation et président du Ministère public, Mohamed Abdennabaoui a indiqué que son département est en train d’élaborer une étude de diagnostic relative à la question, “qui permettra de jeter la lumière sur les problématiques qui entravent la lutte contre ce phénomène, en particulier au niveau de l’intervention judiciaire”.

Cette étude vise également à pointer du doigt les différents stratèges et moyens utilisés pour contourner la loi en vue de légaliser le mariage précoce ou d’en faire une réalité contraignante pour toute décision judiciaire, a fait savoir Abdennabaoui lors d’un colloque sur la question initié par la Présidence du Ministère public en coopération avec l’Unicef.

L’étude permettra par ailleurs d’analyser les divers aspects juridique et judiciaire suscités par cette problématique en rapport avec d’autres sujets tels que la violence à l’égard de l’épouse, l’expulsion du domicile conjugal, la négligence de la famille, le mariage forcé…

 

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Climat des affaires : Un nouveau calendrier législatif

De nouvelles priorités législatives et réglementaires seront tracées pour la période 2020-2021. La stratégie nationale du climat des affaires sera, quant à elle, à l’ordre du jour de la réunion annuelle du Comité national de l’environnement des affaires.

Les préparatifs pour la tenue de la nouvelle réunion du CNEA avancent avec en ligne de mire la mise en œuvre du calendrier législatif pour la prochaine année. Si la nouvelle loi sur le partenariat public privé devra être adoptée durant cette session parlementaire, sur le plan réglementaire, le comité qui regroupe en son sein les départements ministériels, les représentants du secteur privé ainsi que plusieurs partenaires concernés par le développement du secteur privé devront aussi tracer une liste des priorités durant l’année 2020.

En ligne de mire également se trouvent l’évaluation de l’application de la loi relative aux sûretés mobilières et la mise en place du registre national des nantissements. Il s’agit également de poursuivre les efforts en matière de simplification et de dématérialisation des procédures administratives et de création de guichets uniques, de même que le rôle du mécanisme commun d’action entre les secteurs public et privé pour la croissance économique et la création d’emplois créé en 2018 devra se renforcer. Pour ce comité conjoint, les priorités sont l’emploi et le capital humain, la compétitivité des entreprises et leurs rapports avec l’Administration ainsi que les taxes et les marchés publics.

Pour rappel et à l’issue de la réforme de la loi sur les sociétés en nom collectif, en commandite simple, en commandite par actions, SARL et les sociétés en participation, les députés ont appelé à lancer l’idée de rédiger un Code des sociétés. Les attentes des opérateurs résident de leur côté dans l’atténuation des contraintes actuelles qui se dressent devant les sociétés au niveau de la phase judiciaire. L’élaboration d’un Code des sociétés reste le principal outil pour améliorer la compétitivité des entreprises sans oublier la formation des magistrats dans le domaine du droit des affaires pour pouvoir hausser le rendement des juridictions commerciales. Enfin, le volet relatif à la protection des investisseurs minoritaires focalisera également l’attention. Il s’agit de poursuivre le recadrage des normes portant sur la gestion des PME avec le souci de s’aligner sur les standards internationaux.

 

Par : Younes BENNAJAH

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Sociétés de sport : La PLF de 2020 ne contredit-il pas la loi 30-09 ?

Depuis de nombreuses années, il est constaté que le sport national se retrouve confronté à un certain nombre de dysfonctionnements. C’est ainsi que la législation et la réglementation en vigueur gouvernant la matière ont pu paraître insuffisantes ou incertaines quant à l’organisation et au fonctionnement du sport devenu de nos jours mondialisé et évolutif. Cela s’est traduit par une refonte du cadre juridique régissant le sport, concrétisée par l’élaboration de la loi 30-09. Le but étant de faire du sport un fondement du modèle social marocain et un facteur de rayonnement du Maroc à l’échelle mondiale.

Dans le même cadre et pour accompagner la transformation des associations sportives en sociétés conformément à ladite loi,  le Budget 2020 a prévu trois incitations fiscales. La première concerne l’exonération totale de l’IS pendant les cinq premiers exercices d’exploitation. Au-delà de cette période, l’application du taux du barème est plafonné à 20%. La deuxième est relative à l’exonération de l’apport des actifs et des passifs desdites associations aux sociétés. La troisième est l’abattement de 50% de l’impôt sur le revenu (IR) payé par les sportifs.

Interrogé sur l’enjeu de ces dispositions en faveur des sociétés sportives à l’occasion de la présentation du PLF 2020, Faouzi Lakjaâ, Directeur du Budget répond : « Il ne faut pas analyser le process de l’exonération en terme de gain financier mais en terme de rupture dans la gouvernance du sport d’une manière générale ». Parce que la gouvernance de l’activité sportive telle qu’elle se profile aujourd’hui ne se limite pas uniquement au football mais à l’ensemble des activités sportives et ce conformément à la loi.

Et d’enchaîner : « La loi exige aujourd’hui de toutes les associations à créer une société de gestion anonyme, d’où l’intérêt de développer le process, de l’entretenir en matière de gouvernance. C’est dans ce cadre d’ailleurs que s’inscrivent les dispositions fiscales contenues dans le Projet de Loi de Finances 2020 ».

PLF 2020 vs Loi 30-09

L’examen de ces incitations fiscales interpelle essentiellement sur le volet relatif à l’exonération du transfert d’actif de l’association à l’entreprise. Et pour cause :  le texte de la loi 30-09 relative à l’éducation physique et aux sports dans l’article 19 mentionne l’établissement d’une convention entre la société et l’association pour la gestion des biens et non pas d’un apport comme annoncé dans le PLF 2020.

En effet, cet article 19 stipule que l’association sportive et la société sportive qu’elle crée définissent leur relation par une convention approuvée par l’administration. Cette convention doit préciser notamment :

  1. la définition des activités liées au secteur amateur et des activités liées au secteur professionnel dont l’association et la société ont respectivement la responsabilité ;
  2. le transfert à la société des contrats qui s’attachent aux activités liées au sport professionnel, conclus par l’association sous réserve de l’accord préalable de ses cocontractants intéressés par ce transfert ;
  3. la répartition entre l’association et la société des activités liées à la formation des sportifs ;
  4. les modalités selon lesquelles les installations sportives seront utilisées par l’une et l’autre partie ;
  5. les conditions d’utilisation, par la société, du nom, des couleurs, des emblèmes et des autres signes distinctifs de l’association sportive ;
  6. la durée de la convention qui doit s’achever à la fin d’une saison sportive sans pouvoir dépasser 10 ans ;
  7. les modalités de renouvellement de la convention qui ne doivent pas inclure une tacite reconduction ;
  8. les modalités de la résiliation anticipée de la convention qui ne pourra prendre effet qu’à la fin d’une saison sportive et moyennant un préavis de 3 mois.

C’est à partir de cette convention qu’en principe devrait être opéré le transfert de tous types de contrat et l’étude des modalités d’exploitation. Autant dire que cet apport d’actif et de passif à la société de sport avec une neutralité fiscale comme annoncé dans le PLF 2020 parait en contradiction avec la loi 30-09. Une ambiguïté qui mérite toute clarification.

 

Par : Soubha Es-siari

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Voila pourquoi l’Etat décide de se protéger contre les saisies de ses comptes

9,5 Mds de DH, c’est le montant payé par l’Etat en 3 ans dans l’exécution des jugements. Ce manque de rigueur dans la gestion du contentieux public amène l’Etat à prendre des dispositions pour garantir l’équilibre budgétaire. Mohammed Benchaâboun explique les raisons de l’introduction de l’article 9 dans le PLF 2020.

Si le Projet de la Loi de Finances suscite d’habitude des interrogations d’ordre politique, économique et financier, aujourd’hui,  il suscite un débat juridique houleux.

La raison, l’article 9 qui a fait son introduction dans le PLF 2020 et qui n’a pas trop plu aux avocats dont la réaction ne s’est pas faite attendre. Un groupe d’avocats a saisi le Chef du gouvernement par lettre pour dénoncer l’interdiction de la saisie des biens de l’Etat et des collectivités territoriales malgré un jugement prononcé par les tribunaux. Ce qui est contraire au droit civil.

Pour comprendre cette posture, il faut revenir audit article qui stipule que « les créanciers porteurs de titres ou de jugements exécutoires à l’encontre de l’Etat ne peuvent se pourvoir en paiement que devant les services ordonnateurs de l’administration publique concernée ».

Les ordonnateurs sont tenus d’inscrire les crédits nécessaires pour l’exécution des jugements dans la limite des possibilités de leurs budgets. En d’autres termes, en cas d’insuffisance des crédits, les établissements n’exécuteront qu’à hauteur des crédits budgétaires disponibles. Le reste sera réglé sur les budgets des années suivantes.

Mais ce qui est sûr, c’est que les biens et les fonds de l’Etat ne pourront en aucun cas faire l’objet de saisie à cette fin.

Le ministre de l’Economie, des Finances et de la Réforme de l’administration, qui s’est prêté ce mardi 22 octobre au jeu des questions-réponses n’a pas échappé à cette question qui a fait et fera encore couler beaucoup d’encre.

« Durant les 3 dernières années, l’Etat a payé 9,5 Mds de DH dans le cadre de l’exécution des jugements. L’objectif de cet article est de préserver les équilibres financiers et éviter un dysfonctionnement dans la gestion de l’Etat », a précisé Mohammed Benchaâboun.

Toutefois à la lecture dudit article, tel qu’il est formulé, il ressort l’absence de la dimension de l’obligation.

« En cas d’une décision de justice définitive passée en force de chose jugée condamne l’Etat au paiement d’une somme déterminée, cette somme doit être ordonnancée dans un délai de soixante (60) jours à compter de la date de notification de ladite décision judiciaire dans la limite des crédits ouverts au budget », lit-on dans l’article 9.

Le ministre justifie cette mesure par le fait que l’Etat, et en l’occurrence les établissements publics, n’ont pas de visibilité quant au nombre des affaires qui seront jugées encore moins aux montants qui seront fixés. Il est donc difficile pour l’Etat de faire des prévisions sur la base de ce qui va être prononcé. « Par conséquent, si nous ne mettons pas des balises, on sera obligé de puiser dans le Budget et, du coup, compromettre la réalisation des engagements de l’Etat », a expliqué Mohammed Benchaâboun.

C’est le cas d’un incident survenu il y a un mois, lorsqu’il a été prélevé un montant important du compte d’un établissement public. Ce qui s’est répercuté sur le budget de l’Etat.

L’incident nous rappelle l’affaire de la CNSS qui avait recouru à la procédure de l’avis à tiers détenteur (ATD) pour recouvrer ses créances via les comptes bancaires. Une mesure qui avait suscité l’indignation de plusieurs personnes et qui a fini par être suspendue aussi bien par le GPBM que par la DGI (suspension de la notification en avril 2019 des Avis à Tiers Détenteurs (ATD)). Aujourd’hui encore dans le PLF 2020, l’Etat met en veilleuse le recouvrement forcépour remédier à l’épineuse problématique de la liquidité bancaire qui grippe la machine économique.

Et pourtant il s’agit « d’un mécanisme universel, prévu par la loi 15-97 sur le code de recouvrement des créances publiques qui permet à l’administration fiscale et à la Trésorerie Générale du Royaume de demander à la partie détentrice de geler les fonds du débiteur à hauteur du montant de sa dette ».

Aujourd’hui, c’est au tour de l’Etat de mettre les garde-fous pour se protéger des imprévus qui risquent de perturber l’exécution du Budget.

Cela dit, le ministre a précisé qu’il est possible d’améliorer l’article 9 pour garantir davantage les droits des créanciers notamment la mise en place d’une ligne budgétaire dans le budget des collectivités. En effet, les établissements publics notamment les collectivités territoriales ne provisionnent pas les litiges en cours. D’après Maître Laamrani Abdelatif, avocat au barreau de Casablanca, il s’agit de la pérennisation du manque de rigueur dans la gestion du contentieux public.

 

Par : Lamiae Boumahrou

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Clôture de compte : les règles sont mieux définies

Dorénavant, l’ouverture d’un compte bancaire (compte à vue ou à terme et compte titres) fera obligatoirement l’objet d’une convention dont les conditions minimales viennent d’être fixées par le régulateur bancaire.

Parmi les conditions à l’ouverture d’un compte bancaire figurent les modalités de clôture de ce compte, ce qui va sans doute apporter une réponse à une problématique qui envenime les relations entre les banques et leurs clients depuis de nombreuses années. D’apparence simple, l’opération de clôture de compte bancaire ne se déroule pas d’une manière fluide. Bien au contraire, elle donne souvent lieu à des frictions entre les établissements bancaires et leur clientèle. Preuve en est, le fait que presque 20% des réclamations adressées à la Banque centrale en 2018 et 31% des litiges soumis au Centre marocain de médiation bancaire au cours de la même année, portent sur cette problématique. Ceci sans compter les cas qui arrivent jusqu’aux tribunaux. Pour y remédier, le législateur a procédé en 2014 à l’amendement de la disposition de Code de commerce (article 503) qui régit la clôture de compte. Mais malgré cette réforme, le problème persiste et ce, pour la simple raison que les règles édictées par le Code de commerce ne sont pas suffisamment précises.

Dans le cadre d’une circulaire relative à la convention de compte-type qui vient d’être publiée après son homologation par le ministre de l’Economie et des finances, la Banque Centrale apporte des précisions relatives à la clôture de comptes (compte à vue, compte à terme et compte titres). Comment se déroulera dorénavant l’opération de clôture ?

L’un des points importants de cette circulaire est la contractualisation des conditions de clôture de compte. Dorénavant, la convention de compte doit définir les conditions dans lesquelles le compte peut être clôturé. Ainsi, le client aura la possibilité, en consultant le texte de la convention de compte dont un exemplaire lui est obligatoirement remis à l’ouverture du compte, de prendre connaissance des conditions dans lesquelles son compte peut être clôturé.

La clôture de compte, précise la convention-type BAM, est gratuite et ne donne pas lieu à des frais. Lorsque la clôture de compte est à l’initiative du client, l’établissement bancaire lui remet dans un délai maximum de 30 jours, un récapitulatif des opérations automatiques habituelles inscrites au compte pendant les derniers six mois (salaire, prélèvements, virements permanents etc.). En outre, la banque dispose d’un délai de 30 jours pour procéder à la clôture du compte, après la réception de la demande du client. Il s’agit là d’une précision importante sachant que le client n’est pas tenu d’envoyer un préavis à sa banque quand il prend l’initiative de la clôture.

A rappeler que selon le Code de commerce, la clôture de compte peut intervenir à l’initiative du client ou à celle de sa banque. Le compte est aussi clôturé en cas de décès, d’incapacité, de redressement ou de liquidation judiciaire du client. La banque peut donc, comme le client, prendre l’initiative de clôturer le compte, mais après un préavis de 60 jours. L’objectif étant bien sûr de laisser assez de temps au client pour lui permettre d’ouvrir un nouveau compte auprès d’un autre établissement bancaire et d’accomplir les démarches concernant par exemple la domiciliation de ses revenus, les autorisations de prélèvement et les virements permanents.

Toutefois, et c’est à ce niveau que réside la nouveauté introduite par l’amendement de l’article 503 du Code de commerce opéré en 2014, la banque doit obligatoirement clôturer le compte débiteur, si le client cesse de faire fonctionner son compte pendant une période d’une année à compter de la date du dernier solde créditeur inscrit au compte. Donc, lorsqu’un compte se trouve dans cette situation, la banque n’a pas le droit de le maintenir en activité et de continuer à prélever des frais. Toutefois, la banque est tenue, avant de procéder à la clôture du compte, d’en informer le client par lettre recommandée. Si ce dernier n’exprime pas sa volonté de garder le compte dans un délai de 60 jours à compter de la date de notification, le compte est réputé clôturé après l’expiration de ce délai.

La clôture entraîne, précise la convention-type, la restitution immédiate de tous les moyens de paiement (cartes, chéquiers…) ainsi que la résiliation de tous les avis de retraits ou instructions permanentes de transferts de données par le client. Pendant la période de liquidation du compte, le client est tenu de maintenir un solde créditeur suffisant afin de permettre le dénouement des opérations en cours, faute de quoi la banque se trouve en droit de les refuser. Un point très important qui ne doit pas être perdu de vue par le client est que la clôture du compte rend immédiatement exigibles, le solde débiteur éventuel et tous les engagements et dettes envers la banque.

Et en cas de clôture du compte suite au décès du client, les sommes dues à la banque sont prélevées sur le compte, après le règlement des dettes et frais dans l’ordre prévu par la loi. Les héritiers ne peuvent prétendre qu’aux sommes restantes.

Concernant les comptes collectifs, la convention-type prévoit que leur clôture intervient selon l’accord préalable des co-titulaires et ce, soit à la demande écrite des co-titulaires déposée à la banque, soit par lettre recommandée avec accusé de réception adressée à la banque, par l’un des co-titulaires qui en informe les autres. Le compte collectif est également clôturé suite au décès de l’un des co-titulaires. Après clôture du compte, les avoirs sont réputés appartenir à parts égales aux co-titulaires, sauf accord contraire notifié par écrit à la banque.

 

Par : Abdelhafid Chentouf

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Exécution des jugements : l’Etat contre la jurisprudence

Le PLF 2020 prévoit de donner des pouvoirs considérés comme «exorbitants» aux administrateurs de l’État en matière d’exécution des jugements administratifs rendus contre lui. Une initiative qui vient en contradiction avec la jurisprudence, ainsi qu’avec la dynamique royale.

Assistons-nous au premier défi de la nouvelle donne judiciaire ? L’article 9 du projet de loi de Finance 2020 a créé la polémique autour de l’imperium de l’État. Selon un communiqué publié par d’anciens bâtonniers, l’article 9 de celui-ci est une «menace à la crédibilité» des jugements rendus contre l’État. «Nous devons tous être attentifs, faire preuve de prudence face au contenu du projet de loi de Finances 2020, qui a été adopté par le gouvernement et renvoyé à la Chambre des représentants. En fin de compte, cela tue la confiance restante des citoyens, des plaideurs et des avocats dans les décisions et jugements rendus par le pouvoir judiciaire à divers degrés».

Selon la disposition en question, «les créanciers porteurs de titres ou de jugements exécutoires à l’encontre de l’État ne peuvent se pourvoir en paiement que devant les services ordonnateurs de l’administration publique concernée». Ces derniers sont, certes, tenus d’inscrire les crédits nécessaires pour l’exécution des jugements, mais «dans la limite des possibilités de budget». Si la dépense est imputée de crédits qui se révèlent insuffisants, l’exécution des jugements est faite dès lors, par voie d’ordonnancement de la somme concernée, à hauteur de crédits budgétaires disponibles; à charge pour l’ordonnateur de prendre toutes les dispositions pour mettre en place les crédits nécessaires au paiement de la somme restant due sur les budgets des années suivantes. Voilà des libertés données aux administrateurs que ne goûtent pas vraiment les juristes, notamment les avocats et les magistrats. Il s’agirait donc selon eux d’une «mise sous tutelle» de l’appareil judiciaire par les «administrateurs de l’État» qui s’arrogerait ainsi des pouvoirs «exorbitants», en leur donnant la possibilité d’exécuter les jugements selon «leur bon vouloir».

Cette disposition du PLG 2020 vient pourtant en contradiction avec la dynamique souhaitée au plus haut niveau de l’État. Dans sa lettre envoyée le 21 octobre aux participants au Congrès international de la justice, le souverain a ainsi insisté sur le rôle important du système judiciaire dans la consolidation des acquis juridiques en matière d’investissement. Il a par ailleurs rappelé que le Maroc a adopté un arsenal juridique moderne et structurant afin de développer le monde de la finance et des affaires, d’encourager l’investissement et d’insuffler une dynamique vigoureuse au circuit économique, en soutenant les entreprises nationales, ainsi devenues les leviers du développement économique. Il y a ainsi eu l’adoption récemment d’importants textes, comme la version remaniée du Code de commerce, les lois sur les sociétés, la loi sur les garanties mobilières ainsi que la consolidation de l’approche, qui incite les magistrats à dépasser les limites de leur mandat traditionnel pour remplir des missions à visée économique et sociale, en les encourageant à garantir la sécurité et la paix sociale dans l’entreprise.

Selon les témoignages en interne, les atteintes portées à l’obligation d’exécution des décisions des juridictions administratives peuvent être expliquées, d’abord, par une raison quantitative. En effet, l’accroissement du nombre d’affaires portées devant le juge administratif génère de manière quasi-mécanique un accroissement proportionnel du nombre d’atteintes à la chose jugée. À cela s’ajoute la durée excessive de l’instance induite par l’incapacité de la justice à maîtriser l’inflation galopante des domaines d’intervention de l’administration et la complexité croissante des textes juridiques. La prolifération des cas d’inexécution des décisions des juridictions administratives a conduit les responsables politiques à décréter moult circulaires pour inciter les administrations, les collectivités locales et les établissements publics à respecter l’obligation d’exécution qui leur incombe. La lenteur dans l’exécution est souvent due à la complexité des opérations comptables et financières nécessaires pour procéder à l’exécution de la décision juridictionnelle. Aussi, l’administration invoque souvent l’insuffisance des crédits pour se soustraire au paiement de l’indemnité objet de la condamnation. La Cour de cassation rejette constamment cette justification et souligne que «l’absence de crédit pour payer ces sommes ne saurait modifier les droits que les intéressés tiennent» des décisions juridictionnelles intervenues en leur faveur.

En effet, selon la jurisprudence constance, toute décision de justice a une force exécutoire. Cela signifie que, de plein droit, sans autorisation d’aucun autre organe, le jugement peut donner lieu à une exécution forcée, au besoin, sous la forme d’une contrainte matérielle, pour que la décision du juge soit effectivement respectée car ,signalons-le, la fonction judiciaire est aussi une fonction d’autorité.

En d’autres termes, le pouvoir de dire le droit s’accompagne nécessairement d’un pouvoir de commandement désigné «imperium» qui se traduit matériellement par l’apposition, à la fin de chaque jugement, d’une formule appelée «formule exécutoire». Il faut également signaler que l’obligation d’exécuter ne découle pas du caractère de la chose jugée qui peut s’attacher à une décision de justice. L’obligation d’exécution peut s’imposer même si la décision juridictionnelle n’a pas passé en force de chose jugée ou n’est devenu définitive. C’est de la force exécutoire de la décision de justice que résulte l’obligation d’exécution pour l’administration comme pour les particuliers. La formule exécutoire en est l’expression. Dans ce cadre, il y a une différence de taille entre le système juridique marocain et certains systèmes juridiques étrangers, notamment le système juridique français.

En France, du fait de l’existence de deux ordres de juridictions distinctes, il y a deux formules exécutoires: celle des jugements de l’ordre judiciaire qui prévoit l’usage des voies d’exécution de droit commun et celle des jugements de l’ordre administratif qui exclut l’usage de la force publique contre l’administration.

Au Maroc, les textes relatifs aux tribunaux administratifs et des Cours d’appel administratives n’ont pas prévu une formule exécutoire spécifique pour les jugements rendus en matière administrative, ce qui soumet l’administration aux mêmes règles que les particuliers. Face à cet imbroglio, le roi insiste sur l’importance de procéder à une uniformisation des normes et des procédures de règlement des litiges liés à l’investissement, aux niveaux national, régional et international. Le souverain a affirmé qu’il était primordial de dépasser les problématiques liées à la compétence des juridictions nationales, en mettant en place un système juridique adapté. «Ce dispositif nouveau doit permettre de prévenir les problèmes éventuels et d’endiguer les contentieux, grâce à la création d’organes spécialisés dans la résolution de différends, selon des délais raisonnables. Il doit aussi être en mesure de prendre en considération les spécificités des litiges financiers et d’agir avec diligence, efficacité et souplesse», tonne-t-il.

 

Par :  Abdessamad Naimi

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