Bassamat & Laraqui

Les moyens dont dispose l’employeur pour faire face aux effets du coronavirus

Pour faire face aux effets de la pandémie du coronavirus, les employeurs peuvent opter pour l’une ou l’autre des mesures qui leur sont présentées par Afrique Advisors, cabinet de conseil basé à Casablanca.

La situation de pandémie due au virus Covid-19 a contraint le gouvernement à prendre des mesures exceptionnelles pour lutter contre la propagation de ce dernier. Ces mesures impactent fortement l’activité économique et soulèvent diverses problématiques et interrogations juridiques.

Pour y voir plus clair, notamment en droit social, voici un tour d’horizon des principales mesures envisagées par les employeurs pour faire face aux répercussions du Covid-19 sur l’activité de leur entreprise.

  • Recours au télétravail

Le télétravail figure parmi les mesures que l’employeur peut prendre afin d’assurer la sécurité et la santé de ses employés au travail.

Actuellement, le télétravail n’est pas régi par les dispositions du code du travail.

A ce titre, on peut noter l’existence d’une divergence doctrinale relative au fondement textuel du recours au télétravail. En effet, pour une partie de la doctrine, il est possible de se fonder sur les articles 2, 8, 264 et 295 du code du travail ainsi que sur le décret n°2-12-262 se référant au travail à domicile et fixant les obligations de l’employeur en la matière, pour déterminer les conditions dans lesquelles un employeur peut recourir au télétravail. Il s’agit notamment de la position soutenue par le ministère du Travail et de l’Insertion professionnelle dans son guide à destination des employeurs et des salariés en relation avec le virus Covid-19.

Un autre courant doctrinal considère toutefois qu’il n’est pas possible de se fonder sur l’article 8 du code du travail pour aborder la question du télétravail dans la mesure où cet article concerne le travail à domicile et a comme objectif principal de permettre d’établir une présomption de salariat dans le cadre d’un travail à domicile.

En tout état de cause, le fait que le télétravail ne soit pas réglementé n’empêche pas l’employeur d’y recourir. En l’absence de réglementation, il n’est pas nécessaire que l’employeur obtienne l’accord du salarié pour le mettre en place. De ce fait, la consultation des partenaires sociaux n’est a priori pas non plus requise.

Le télétravail peut donc être mis en place directement par l’employeur, par tout moyen, tels qu’une note de service, un email informatif destiné aux salariés, un avenant au contrat de travail, etc.

Enfin, d’après la doctrine et notamment le guide du ministère du Travail, le recours au télétravail par l’employeur est conditionné (i) au respect de l’ensemble des conditions d’hygiène et de sécurité par l’employeur et (ii) à la souscription d’une assurance contre les accidents du travail susceptibles d’intervenir à domicile.

  • Congés payés

Contrairement aux congés sans solde, un employeur peut imposer à ses salariés de prendre leurs congés payés acquis.

L’article 245 du code du travail prévoit que “les dates du congé annuel sont fixées par l’employeur après consultation des délégués des salariés et, le cas échéant, des représentants des syndicats dans l’entreprise […]”.

Il est aussi prévu qu’en cas d’accord avec les intéressés, la date de départ en congé annuel payé peut être soit avancée soit retardée, et ce en remplissant les formalités prévues par le code du travail.

Par conséquent, après avoir consulté les partenaires sociaux, un employeur peut imposer à ses salariés de prendre des congés payés. Cette formalité est une simple consultation des partenaires sociaux, qui ne nécessite pas leur accord préalable.

  • Congés sans solde

Le code du travail marocain ne prévoit aucune réglementation à ce sujet. Ce dernier ne prévoit qu’un seul cas de congé sans solde : lorsqu’une salariée à la suite du congé maternité décide de ne pas reprendre le travail pour élever son enfant, pour une durée d’une année. En dehors de cette hypothèse, les congés sans solde doivent être discutés et expressément convenus par l’employeur et le salarié.

Ainsi, l’employeur ne peut pas imposer à ses employés de prendre des congés sans solde. Une telle mesure ne peut être prise qu’à la suite d’un accord bilatéral, puisque cette décision relève de la liberté contractuelle entre l’employé et son employeur. En cas d’accord entre les deux parties, le contrat de travail n’est pas résilié mais suspendu. L’employé ne reçoit aucune rémunération de l’entreprise pendant la durée du congé.

Enfin, il est important qu’une telle décision soit exprimée par écrit afin d’éviter toute éventuelle divergence d’interprétation par l’une des parties, qui pourrait conduire à un différend.

  • Réduction du temps de travail

L’employeur peut décider de réduire le temps de travail de ses salariés, sous réserve du respect de certaines conditions.

Dans son article 185, le code du travail n’autorise l’employeur à réduire la durée du travail de ses employés, qui entraîne donc une réduction de salaire, que pour se protéger d’une crise économique passagère, pour une période continue ou interrompue n’excédant pas soixante (60) jours par an et sous réserve de consultation des délégués des salariés et, le cas échéant, des représentants des syndicats.

Aucune réduction au-delà de 60 jours n’est possible sans l’accord des partenaires sociaux précités. En l’absence d’accord, l’autorisation du gouverneur de la préfecture ou de la province est nécessairement requise.

En tout état de cause, c’est le temps de travail effectif qui est rémunéré et ne peut en aucun cas être inférieur à 50% du salaire normal, sauf dispositions plus avantageuses pour l’employé.

  • Augmentation du temps de travail

Pour rappel, l’article 184 du code du travail prévoit que dans les activités non agricoles, la durée normale de travail des salariés est fixée à 2288 heures par année ou 44 heures par semaine. Cette durée peut être répartie librement par l’employeur sur l’année selon les besoins de l’entreprise à condition que la durée normale du travail n’excède pas 10 heures par jour.

Les dispositions de l’article 196 du même code indiquent qu’il est possible de prévoir des heures supplémentaires dans des cas particuliers. En effet, notamment lorsque l’entreprise doit faire face à des travaux d’intérêt national ou à des surcroîts exceptionnels de travail, les salariés peuvent être employés au-delà de la durée normale de travail dans les conditions fixées par voie réglementaire.

Le décret d’application n°2.04.570 fixant les conditions d’emploi des salariés au-delà de la durée normale de travail fixe les conditions dans lesquelles peuvent être appliquées les heures supplémentaires.

En effet, l’article premier du décret prévoit que “les entreprises qui doivent faire face à des travaux d’intérêt national peuvent employer leurs salariés au-delà de la durée normale de travail pendant la durée d’exécution des travaux nécessaires, sous réserve des conditions suivantes:

-La durée journalière de travail ne peut dépasser 10 heures;

-La non suspension du repos hebdomadaire des salariés concernés;

-La non application des dispositions du présent article aux salariés âgés de moins de 18 ans et aux salariés handicapés;

-La notification, par écrit, à l’agent chargé de l’inspection du travail du motif justifiant l’application du présent article, selon chaque cas”.

Les heures supplémentaires sont payées en même temps que le salaire dû, et sont majorées de 25% si elles sont effectuées entre 6 heures et 21 heures pour les activités non agricoles et entre 5 heures et 20 heures pour les activités agricoles, 50% si elles sont effectuées entre 21 heures et 6 heures dans les activités non agricoles et entre 20 heures et 5 heures pour les activités agricoles, 50%  à 100% si elles sont effectuées le jour du repos hebdomadaire du salarié, même si l’employeur lui a accordé un repos compensateur. A noter que les heures supplémentaires ne peuvent dépasser 80 heures de travail par an pour chaque salarié et 100 heures si la nature de l’activité de l’entreprise l’exige et sous réserve de la consultation des délégués des salariés ou, le cas échéant, du comité d’entreprise.

  • Organisation du travail par roulement des équipes 

Certaines entreprises pourraient envisager d’organiser le travail par roulement ou relais des équipes par exemple, soit en raison de l’augmentation de l’activité de production soit pour respecter les règles de distanciation et afin que les employés assurent à tour de rôle les fonctions essentielles de l’entreprise, lorsque le recours au télétravail n’est pas possible.

L’organisation du travail par roulement ou par relais des équipes est prévue par les articles 187 et 188 du code du travail. Selon l’article 187, le travail par roulement ou relais est interdit sauf dans les entreprises où cette organisation est justifiée par des raisons techniques.

Il est à noter que les raisons techniques permettant de recourir à ce type d’organisation ne sont pas définies par voie réglementaire. S’il ne fait pas de doute que ce type d’organisation peut intervenir pour les entreprises nécessitant par exemple de fonctionner en continu, la question se pose de savoir si l’employeur peut envisager de mettre en place un roulement des employés pour assurer les fonctions essentielles de l’entreprise, lorsqu’il n’est pas possible de recourir au télétravail. Au vu du contexte actuel exceptionnel, une telle solution paraît envisageable mais sa mise en œuvre doit être appliquée avec prudence en l’absence de base légale permettant de s’assurer de sa légalité.

En tout état de cause, l’employeur qui souhaite organiser par roulement ou relais le travail de ses équipes est, conformément à l’arrêté du ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle n° 341-05 fixant les modalités d’application des articles de 187 à 192 du code du travail, notamment tenu de:

– consulter les délégués du personnel ou du comité d’entreprise, le cas échéant;

– indiquer la durée du travail modifiée ou les heures supplémentaires ou récupérées;

– afficher le programme adopté pour l’organisation du travail dans un lieu fréquenté par les salariés ou dans le lieu où les salaires leur sont habituellement versés;

– informer par écrit l’agent chargé de l’inspection du travail de ce programme.

Enfin, selon l’article 188 du code du travail, en cas d’organisation du travail par équipes successives, la durée de travail de chaque équipe doit être continue mais ne peut excéder huit heures par jour. Une interruption pour le repos est possible sous réserve de ne pas dépasser une heure.

  • Licenciements pour motifs économiques

Un employeur peut envisager de recourir au licenciement pour motifs économiques sous réserve du respect d’un certain nombre de conditions dont notamment l’obtention d’une autorisation du gouverneur de la préfecture ou de la province. A défaut, le licenciement sera considéré comme abusif. Le licenciement pour motifs économiques est régi par les articles 66 et suivants du code du travail. Il est soumis au respect par l’employeur de certaines conditions:

– Il ne peut être envisagé que dans les entreprises commerciales, industrielles, dans les exploitations agricoles, forestières et leurs dépendances ou dans les entreprises d’artisanat, occupant habituellement au moins 10 salariés (en-dessous de 10 salariés, le code du travail est muet);

– Au moins un mois avant de procéder au licenciement, la décision de licenciement doit être portée à la connaissance des délégués des salariés (ou, dans les entreprises employant habituellement plus de cinquante (50) salariés, au comité d’entreprise qui se substitue aux délégués des salariés dans le cadre de cette concertation) et, le cas échéant, des représentants des syndicats de l’entreprise. L’employeur doit fournir tous les renseignements nécessaires, y compris les motifs du licenciement, le nombre et catégories de salariés concernés et la période dans laquelle le licenciement sera entrepris;

– Ce dernier doit engager des concertations avec les partenaires sociaux précités pour examiner les mesures alternatives susceptibles d’empêcher le licenciement ou atténuer ses effets négatifs, et ce, en envisageant également la possibilité de réintégrer dans d’autres postes les salariés dont le licenciement est envisagé. Un procès-verbal devra être établi et signé par les deux parties. Une copie doit être adressée aux délégués des salariés et une autre au délégué provincial chargé du travail.

– La demande de licenciement doit ensuite être adressée par l’employeur au délégué provincial chargé du travail, accompagnée des justificatifs et du procès-verbal. De plus, en vertu de l’article 67 du code du travail, la demande de licenciement pour motifs économiques doit être accompagnée, outre les documents précités, des justificatifs suivants:

– Un rapport comportant les motifs économiques, nécessitant l’application de la procédure de licenciement;

– L’état de la situation économique et financière de l’entreprise.

 

Par : S.I

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Port du masque de protection: Voici ce que dit la circulaire du Parquet général

Mohamed Abdennabaoui vient d’adresser une circulaire aux autorités judiciaires du Royaume, les appelant «à l’application sévère des lois en vigueur concernant le port du masque de protection» contre la propagation du Covid-19. Le président du Parquet général préconise des «poursuites pour les contrevenants» en se référant au décret-loi relatif à l’état d’urgence sanitaire. En revanche, la circulaire du Parquet n’évoque pas la typologie des masques à utiliser, verbaliser ou tolérer. «Il faut absolument préciser et définir le type de masque, sinon un citoyen peut être poursuivi s’il ne met pas le masque vendu chez l’épicerie. En plus, le masque vendu n’a rien de médical», alerte un médecin demandant plus de précisions à ce titre.

Rappelons que le port de masque de protection est désormais obligatoire dès ce mardi 7 avril. La décision concerne les personnes autorisées à sortir de leur domicile. Pour garantir ces masques en quantités suffisantes et dans le cadre de la mise en œuvre des instructions royales, les autorités ont mobilisé un ensemble d’industriels nationaux pour les produire. Le prix de vente de l’unité a été fixé à 80 centimes, et ce, avec le soutien du Fonds spécial Covid19.

Toutefois, ces masques ont rapidement disparu des rayons des grandes surfaces (notamment à Fès). «D’où nos inquiétudes par rapport à un risque d’opérations de spéculation. Surtout, si des grossistes se mettent à l’œuvre et assèchent le marché des masques», souligne notre source appelant enfin «à la production de masques réutilisables et stérilisables».

Fichier attaché :

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Des zones d’ombre sur l’«indemnité coronavirus»

Le versement des indemnités aux salariés immatriculés à la CNSS et en arrêt temporaire de travail est imminent. Le dernier délai au titre du mois de mars pour l’inscription et la déclaration des salariés en arrêt était fixé au vendredi 3 avril. En deux semaines, plus de 113.000 entreprises ont déclaré l’arrêt d’activité, soit  plus de 700.000 salariés.

Pour l’instant, ce dispositif est activé jusqu’à fin juin. Néanmoins les entreprises qui ont subi une baisse d’activité mais qui maintiennent une partie de leurs salariés au travail s’interrogent: Ces employés peuvent-ils cumuler un salaire pour les jours travaillés et l’«indemnité Coronavirus» afin de garantir un revenu de 2.000 DH? Les différents responsables contactés par L’Economiste assurent que l’esprit de la mesure est tout autre.

«Cette indemnité est réservée aux salariés en arrêt temporaire, ceux qui ne sont pas licenciés et qui ne reçoivent aucune rétribution de l’entreprise». Si le salarié reçoit une rémunération de son employeur, il ne peut en parallèle bénéficier de l’indemnité. Le système de proportionnalité n’est pas prévu par ce dispositif.

Une position critiquée par des chefs d’entreprise: « C’est un non-sens. La proportionnalité  de l’indemnité au nombre de jours travaillés soulagera le fonds covid-19 et permettra aux entreprises de préserver l’emploi. Sinon, nous risquons de nous retrouver face à des abus».

Les salariés en arrêt temporaire ne sont pas licenciés, leur contrat de travail est juste suspendu. «La relation professionnelle est maintenue entre l’employé en arrêt temporaire de travail en raison des répercussions économiques du covid-19 et son employeur. Le contrat de travail n’est pas arrêté»,  précise Salima Kharbouch, directrice de la Protection sociale au ministère de l’Emploi.

L’article 352 du code du travail considère comme périodes de travail effectif qui ne peuvent être déduites de la durée des services entrant en ligne de compte pour l’attribution de la prime d’ancienneté: «la fermeture temporaire de l’entreprise en raison d’un cas de force majeure, d’une décision judiciaire ou d’une décision administrative».

La philosophie globale des mesures en faveur des salariés, mises en place par le Comité de veille économique est la préservation de l’emploi. Les entreprises sont obligées de reprendre les salariés, en arrêt temporaire, une fois la crise terminée. Mohamed Benchaâboun, ministre de l’Economie et des Finances l’a également confirmé.

Sauf que les conditions dans lesquelles ces salariés seront réintégrés ne sont pas fixées: faut-il y aller progressivement en fonction de l’activité ? Dans ce cas, ceux qui ne seront pas réintégrés tout de suite vont-ils être de nouveau indemnisés le temps que l’activité reprenne ?  Les entreprises peuvent-elles s’appuyer sur l’article 185 du code du travail sur la réduction du temps de travail et des salaires?

De même, les entreprises qui ne pourront pas reprendre tous les effectifs peuvent-elles recourir au licenciement et appliquer les dispositions prévues par le code du travail? Autant d’interrogations suspendues à la publication d’un décret-loi qui doit lever les zones d’ombre et donner une base juridique à la mesure sur l’indemnisation des salariés mise en place en raison de l’urgence de la situation.

 

Par : Kadija Masmoudi
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Nouvelles directives pour les marchés publics

L’argentier du Maroc a émis une circulaire pour simplifier et fluidifier, durant l’état d’urgence sanitaire, certaines procédures de passation et d’exécution des marchés de l’Etat et des collectivités territoriales.

Mohamed Benchaâboun annonce de nouvelles directives visant à simplifier certaines procédures liées aux marchés publics de l’Etat et des collectivités territoriales, rapporte Aujourd’hui le Maroc dans son édition du 6 avril.

Il s’agit de mesures d’accompagnement en termes de simplification et de fluidification de certaines procédures de passation et d’exécution des marchés de l’Etat et des collectivités territoriales, durant l’état d’urgence sanitaire. L’argentier du Maroc a, dans ce sens, émis une circulaire dans laquelle il détaille les 7 mesures à engager.

Ainsi, pour éviter tout retard de paiement, il a été décidé à titre exceptionnel de surseoir à l’exigence de la signature électronique des documents précités pour les entreprises et les maîtres d’ouvrage ayant rencontré des difficultés pour obtenir le certificat électronique classe 3 de Barid-Esign. La deuxième mesure prescrite concerne la procédure de soumission électronique au niveau du portail des marchés publics. Afin de fluidifier les procédures de dépouillement des plis électroniques par les commissions d’ouverture des plis, le ministre décide de surseoir à l’affectation des bi-clés de chiffrement/déchiffrement aux consultations publiées par les maîtres d’ouvrage.

Le département ministériel a également décidé d’accepter les publications des avis d’appels d’offres effectuées sur les éditions électroniques des journaux, dès lors que le paragraphe 2 de l’article 20 du décret sur les marchés publics ne prévoit pas expressément l’obligation du support papier pour ce genre de publications. Parmi les décisions prises, figure également le maintien des délais de paiement impartis à l’Etat et aux collectivités territoriales, avec application des intérêts moratoires à tout dépassement de ces délais. Et, au cas où l’exécution des marchés publics aurait été impactée par les mesures d’état d’urgence sanitaire, Mohamed Benchaâboun indique que «les maîtres d’ouvrage peuvent, après avoir été saisis par les entreprises concernées, faire application, au cas par cas, des dispositions de l’article 47 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux ou celles de l’article 32 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de services portant sur les prestations d’études et de maîtrise d’œuvre».

Par : Faycal Faquihi
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Covid-19. Etat d’urgence sanitaire: le casse-tête de la date d’entrée en vigueur

Le décret n°2.20.293 relatif à l’état d’urgence sanitaire prévoit quand finira cette mesure, mais élude la date de son début. Focus sur un casse-tête juridique.

L’état d’urgence sanitaire est en vigueur, mais depuis quand ? La question n’est pas anodine. Elle se pose avec insistance dans les milieux juridiques. Et risque, après coup, d’investir les juridictions marocaines.

Dans les faits, l’urgence sanitaire a été instaurée le 20 mars 2020, à 18H. Sa mise en place a été annoncée la veille par communiqué du ministère de l’Intérieur. Deux jours plus tard, le gouvernement a adopté le décret-loi n° 2.20.292 (validé le lendemain par les deux commissions parlementaires) et le décret n° 2.20.293.

  • Le premier texte fait figure de cadre légal général, applicable à l’état d’urgence actuel et ceux qui seraient décidés dans le futur. Ses dispositions phares : La reconnaissance d’infractions propre à l’état d’urgence et la suspension, le temps de cette mesure, de tous les délais légaux et réglementaires (avec exceptions).
  • Le second réglemente l’état d’urgence actuel, où il est spécifiquement question de stopper la propagation du coronavirus. Ce qui suppose qu’il est limité dans le temps. Diffusé par la primature, le communiqué officiel qui avait accompagné l’adoption de ce texte au Conseil du gouvernement indiquait une durée comprise entre le 20 mars et le 20 avril.

Le 20, le 24 ou le 25 mars ?

Les décret-loi et décret n’ont été publiés au bulletin officiel que le 24 mars. En lisant le décret n° 2.20.293, premier constat: Il prévoit la date de levée de l’état d’urgence (20 avril 2020), mais élude celle de son activation, se détachant ainsi du communiqué du Chef du gouvernement.

Cette omission a un sens. Selon l’Association des barreaux du Maroc, elle épargne à l’exécutif “l’embarras qu’aurait généré l’adoption d’un décret non-conforme à l’article 6 de la Constitution“. Lequel consacre le principe de la non-rétroactivité de la loi – Et par extension aux décrets – et l’obligation de publication des normes juridiques.

“Le décret n’indique pas la date de son entrée en vigueur. Il ne confirme pas non plus l’annonce de l’état d’urgence émise le 19 mars par le ministère de l’Intérieur. Cela signifie qu’il ne peut pas être applicable avant sa publication au bulletin officiel”, note l’ABAM qui a adressé une lettre en ce sens mardi 24 mars au Président du ministère public.

Si le décret ne remonte pas – et ne peut remonter- son entrée en vigueur à une date antérieure à sa publication au B.O., il n’offre pas non plus d’indication quant à son application post-publication. Une information qui revêt pourtant “une extrême importance”, à en croire Me Hassan Birouaine, bâtonnier du barreau de Casablanca.

Où réside cette importance ? Dans la détermination des “effets juridiques” liés aux deux textes, note le bâtonnier dans une circulaire adressée ce mercredi à ses confrères. L’ambigüité touche précisément la date “à partir de laquelle s’applique la suspension des délais légaux et réglementaires”, mais aussi “celle de l’application des dispositions répressives relatives à l’état d’urgence”.

Dans un sens ou dans l’autre, les droits des personnes sont en jeu. Côté délais, justiciables et avocats voudraient une idée claire sur les marges temporelles dont ils disposent aux niveau des recours, actions et autres démarches judiciaires couverts par le moratoire. L’autre volet questionne la légalité – et non la légitimité – des arrestations effectuées avant l’entrée en vigueur des deux textes, et qui seraient motivées par le non-respect de l’état d’urgence sanitaire. Même si le ministère public peut faire appel à des qualifications pénales génériques (rébellion, incitation à l’attroupement, mise en danger d’autrui etc.)

Mais même pour le 24 mars, il y a débat: “Quand un texte ne mentionne pas expressément sa date d’entrée en vigueur, il n’est applicable qu’à compter du jour qui suit sa publication au bulletin officiel”, selon une note du barreau de Casablanca, qui fait référence à une jurisprudence de la Cour suprême (Cour de cassation actuelle).

 Dans une missive datée de ce mercredi, dont Médias24 détient copie, le bâtonnier appelle d’ailleurs ses confrères à considérer ce mercredi 25 mars comme date officielle d’entrée en vigueur des deux textes régissant l’état d’urgence. Il urge les avocats d’observer la prudence quand aux dossiers de recours et autres procédures encadrées par des délais. Il s’agit d’éviter que des “droits soient perdus ou frappés de forclusion”. Il y va de la responsabilité civile et disciplinaire de l’avocat.

 

Par : A.E.H
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Coronavirus. Justice : Décision inédite au tribunal administratif de Casablanca

… Inédite certes, jugée courageuse par les milieux juridiques, mais qui a été infirmée en appel. Souffrant de diabète, un ressortissant libyen a été en première instance autorisé provisoirement d’accès au territoire marocain malgré la fermeture des frontières. Une ordonnance motivée par la notion de “Justice au sens large”, et mettant de côté l’interprétation juridique au sens strict.

Acte 1. Première instance. La Justice du bon sens… au temps du coronavirus. Bloqué pendant plusieurs jours à l’aéroport de Casablanca, un ressortissant libyen s’est vu accorder le droit d’accès au territoire marocain en attendant la levée de l’embargo aérien décrété par les autorités marocaines.

Datant du 23 mars 2020, cette ordonnance de référé, dont Médias24 détient copie, a été rendue par le président du tribunal administratif de Casablanca. Elle fait suite à la demande initiée le 19 mars par l’avocat du demandeur.

Arrivé en provenance du Libéria, où il représente une branche de la Société Libyenne d’Investissement, le requérant devait faire escale au Maroc avant de prendre un vol vers la Tunisie. Son arrivée à l’aéroport Mohammed V coïncidera avec l’interdiction, par le Royaume, des vols internationaux de passagers en provenance et à destination de son territoire.

Résultat, le passager sera confiné (malgré lui) plusieurs jours au point de transit. Il se verra, de surcroit, interdire par les services de l’Aéroport de quitter ce dernier jusqu’à levée de l’embargo aérien.

D’où sa requête en référé, où il demande l’autorisation “d’accès au Maroc via l’aéroport de Casablanca”, tout en faisant valoir “l’engagement du consulat libyen à le prendre en charge en attendant la levée de l’embargo aérien.”

Demande validée par le juge. Selon quelle base ? En faisant valoir “les règles générales et principes de Justice au sens large”, tout en laissant de côté la lecture sèche de la loi.

S’il reconnait l’existence de motif légitimant les restrictions opposées au ressortissant à l’aéroport, liées notamment au contexte actuel de lutte contre la propagation du coronavirus, le tribunal ne trouve aucun obstacle “à l’examen de la demande d’accès au territoire durant la période l’embargo aérien”.

En substance, le président du tribunal a estimé que le cas du ressortissant libyen n’entrait pas dans un champ légal particulier, en l’occurrence celui de “la loi relative à l’entrée et au séjour des étrangers au Royaume du Maroc, à l’émigration et l’immigration irrégulières”.

En effet, ce texte ne prévoit pas le cas de voyageurs étrangers bloqués dans les aéroports internationaux du Royaume du fait d’une interdiction de vol. Il y va cependant de la protection des “libertés” et du statut juridique” des individus. De là, le juge est censé “faire cesser tout préjudice dont se plaint une personne bloquée à l’aéroport”.

Une position que motive d’autant plus l’état de santé du ressortissant, étant atteint d’une maladie chronique (diabète) selon une note du consulat général de Libye au Maroc, versée dans le dossier.

Pour le président de la juridiction administrative, rien ne justifiait donc que le requérant “soit interdit d’accès au territoire pendant la période de fermeture des frontières”, mais sous réserve de “vérifier l’état de santé” de l’intéressé et précisément s’il “n’est pas été atteint par le coronavirus”, précise l’ordonnance de référé.

Ordonnance infirmée en appel

Act 2. Appel. Marquée par l’originalité de ses attendus, dans un contexte propice à la souplesse d’interprétation, cette ordonnance restera toutefois anecdotique. Trois jours plus tard (le 26 mars), elle sera infirmée par la Cour d’appel de Rabat après un recours formulé par l’Agent judiciaire du Royaume, qui a initié cette démarche au nom du ministère des affaires étrangères et de la Direction générale de la sûreté nationale.

A rebours de la première ordonnance, la juridiction d’appel s’en remettra à une lecture restrictive, mettant en avant le caractère “souverain” de la décision prise par les autorités marocaines [embargo aérien], affirmant ” que ses effets juridiques ne peuvent être obstrués ou éludés que dans les cas décidés”.

Par : A.E.H
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Cas de force majeure: ce que disent les jurisprudences marocaine et française

Les pertes d’emplois à cause du Coronavirus et des décisions administratives prises pour le contrer relèvent-elles du cas de force majeure ? Les juges marocains seront éventuellement amenés à trancher sur la question. Les jurisprudences marocaine et française pourraient les inspirer.

Depuis le début de la pandémie du Coronavirus, les emplois perdus s’accumulent et les interrogations aussi. Les employeurs et employés, dans le brouillard, ne savent plus quels sont leurs droits et obligations, ni comment qualifier ces circonstances exceptionnelles.

S’agit-il de la force majeure ? C’est la question que Médias24 a posée à plusieurs experts en matière de droit social et qui a été longuement évoquée dans nos articles.

Des juristes nous ont signalé l’existence de décisions sur lesquelles il serait intéressant de se pencher. Bien qu’elles portent sur des affaires différentes, leurs conclusions pourraient inspirer les juridictions marocaines qui seront potentiellement amenées à trancher dans des litiges relevant du droit social et liés au Coronavirus.

La première, rendue par une juridiction marocaine en mars 2018, correspond à une situation similaire à celle que nous vivons aujourd’hui. Cela dit, elle ne relève pas d’une menace d’épidémie.

La seconde est plus récente, elle date du 12 mars 2020. C’est une décision provenant d’une juridiction française qui évoque directement les circonstances exceptionnelles du virus COVID-19.

Retour sur les faits l’affaire marocaine

En 2015, une entreprise a décidé d’arrêter la production de sacs en plastique, conformément à la loi 77/15 interdisant une telle activité. Conséquence, les employés ont été mis à la porte. Une décision que la justice marocaine a qualifiée de “fait du prince”.

Le fait du prince est un cas de force majeure, tel que défini à l’article 269 du Dahir des obligations et des contrats.

Dans le cas d’espèce, la décision de l’entreprise ne relève pas de sa volonté. Bien au contraire, c’est une intervention tierce, provenant de l’administration, qui s’impose tant aux employés qu’à l’employeuse.

Les salariés ayant perdu leurs emplois suite à cette décision n’ont pas eu droit à des indemnités.

En effet, la Cour de cassation, dans son arrêt du 27 mars 2018, précise que la demande d’indemnités pour dommages causés aux salariés est infondée.

La justice française qualifie les circonstances exceptionnelles du Coronavirus de force majeure

Plus récemment, dans une ordonnance en date du 12 mars 2020, rendue par la 6ème chambre de la Cour d’appel de Colmar, en France, les circonstances exceptionnelles dues au Coronavirus sont considérées comme cas de force majeure en raison de leurs caractéristiques “extérieures, imprévisibles et irrésistibles“.

L’affaire en question ne porte pas sur un licenciement ou une perte d’emploi. Il s’agit plutôt de statuer sur la recevabilité de la requête d’une préfète, relative à la rétention administrative d’un individu. Ce dernier n’a pas pu “être conduit à l’audience de la Cour d’appel en raison des circonstances exceptionnelles et insurmontables, revêtant le caractère de la force majeure, liées à l’épidémie en cours du COVID-19”.

Le fait que la justice française considère la situation exceptionnelle due au Coronavirus comme un cas de force majeure, ne signifie pas que les juridictions marocaines devront automatiquement lui emboîter le pas.

C’est au juge marocain que revient l’appréciation au cas par cas. Toutefois, cette jurisprudence peut constituer une source d’inspiration et de réflexion.

 

Par : S.I
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Report des crédits bancaires: les remarques du bâtonnier de Casablanca au GPBM

Le bâtonnier du barreau de Casablanca, Me Hassan Birouaine a adressé ses observations au président du GPBM au sujet de la procédure de “suspension” des échéances de crédits bancaires. Dans un courrier daté du 30 mars, il pointe du doigt quelques discordances et contradictions

Suite à la décision du comité de veille économique (CVE) d’accorder la possibilité aux ménages et aux entreprises en difficulté de reporter les échéances de leurs crédits bancaires, la procédure de report a été mise en application par différentes banques, notamment par voie électronique.

En analysant le contenu de certains documents produits par le secteur bancaire à cette occasion, les avocats ont soulevé quelques discordances et contradictions, adressées au Groupement professionnel des banques du Maroc (GPBM) par courrier, en date du 30 mars 2020.

Ces observations concernent deux documents: celui émis par le GPBM annonçant “les principales mesures proposées par les banques pour soutenir les ménages et les entreprises en difficultés à cause de la pandémie du coronavirus”, ainsi que la “demande de suspension des échéances de crédit bancaire” fournie par les banques à leurs clients.

Deux éléments ont attiré l’attention des avocats suite à l’analyse de cette demande. Le premier concerne “la discordance entre la version arabe et française de la demande”.

Dans sa version française, elle est désignée comme demande de suspension tandis que la version arabe évoque “تأجيل استحقاقات قرض” ce qui se traduit par “report“.

L’importance de la terminologie choisie s’explique par les conséquences qui pourraient en découler.

C’est pourquoi, le bâtonnier du barreau de Casablanca propose de remédier à la situation en modifiant la terminologie choisie et “d’utiliser la même à laquelle il est fait référence à l’article 149” de la loi 31-08 édictant des mesures de protection du consommateur. Cet article de loi porte sur la suspension des échéances de crédit.

Le deuxième élément sur lequel s’arrête l’analyse des avocats relative à la demande de suspension des échéances de crédit bancaire, concerne une “contradiction” relevée dans le 4ème paragraphe de la demande de suspension des échéances de crédit bancaire.

Il s’agit de “l’obligation de l’emprunteur d’accepter toutes les modifications ultérieures, dont notamment le montant des échéances”, une condition qui “viderait le processus de tout sens” car elle ne correspond pas aux dispositions de l’article 149 de la loi 31-08 relatif au délai de grâce.

A travers cet article, la loi prévoit la possibilité de suspendre les échéances de crédit bancaire sans que cela n’impacte le montant des échéances.

Pourtant, le GPBM a bien précisé dans son communiqué du 28 mars, que le report des échéances de crédit bancaire, si accordé, n’implique ni frais ni pénalité de retard.

Les avocats proposent de prévoir dans la demande deux options parmi lesquels les clients peuvent choisir:

– Augmentation de la durée du contrat qui serait égale à la durée de la suspension de paiement avec maintien du montant des échéances

– Maintien de la durée du contrat avec augmentation du montant des échéances, sous réserve d’un commun accord entre les parties, “de façon à se référer à des modalités de calcul simples et claires afin de répercuter, de façon élémentaire, la durée de la suspension sur le montant des échéances”.

Ce n’est pas tout. Le courrier de Me Hassan Birouaine s’est également penché sur le document émis par le GPBM portant sur “les principales mesures proposées par les banques pour soutenir les ménages et les entreprises en difficultés à cause de la pandémie du coronavirus”.

Les avocats ont remarqué l’absence, dans ce document, d’informations essentielles, à savoir: “la date d’entrée en vigueur et la période couverte par les mesures qui y sont proposées”.

De plus, le même document prévoit la suppression du délai de rétractation de 7 jours pour les reports accordés. Or, comme le précise Me Birouaine dans son courrier, ce délai est une disposition d’ordre public, “il ne peut être ni supprimé ni écarté”.

 

Par : S.I
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Congé sans solde : pas illégal, mais mâtiné de pièges

Le congé sans solde existe dans le secteur public, mais n’a aucun fondement légal dans le privé. Pourtant, beaucoup d’employeurs y ont recours dans cette période de grands bouleversements.

Des employeurs qui imposent des congés « sans solde » à leurs salariés, la pratique est courante en ces temps de crises. Mais est-elle légale ?

Elle n’a en tout cas aucune trace dans le code du travail. Et pour cause, « le congé sans solde n’existe que dans le statut de la fonction publique, où il est soumis à des conditions draconiennes. Dans le privé, il n’a pas de base légale », tranche Me Bassamat Fassi Fihri, avocate au barreau de Casablanca.

« Les salariés en arrêt d’activité et privés de salaire sont censés percevoir l’indemnité versée par l’Etat. D’où le recours, par les entreprises, au congé sans solde puisque l’Etat va se substituer à l’employeur en remettant une indemnité forfaitaire ».

L’expression « congé sans solde est d’ailleurs erronée eu égard au contexte actuel », soupèse notre interlocutrice. Me Bassamat évoque plutôt « une suspension de la relation de travail expliquée par une cessation ou diminution d’activité ». Or, « le salaire est la contrepartie du travail (article 723 du Dahir des obligations et des contrats) ».

Dans le cas des licenciements économiques, le recours à cette pratique est aussi une manière de contourner l’article 66 et suivant du CT. En principe, ces licenciements sont subordonnés à une autorisation délivrée par le gouverneur. « Mais compte tenu de l’urgence de la situation, des entreprises ont tendance à sauter cette étape contraignante en termes de procédures et de délais (théoriquement jusqu’à 2 mois pour obtenir l’autorisation) », explique Me Bassamat.

Consentement libre et éclairé

Le CT emploie le terme « congé non payé », mais dans un cas unique : celui de la mère salariée qui, en vue « d’élever son enfant, s’accorde avec son employeur pour bénéficier d’une année de repos non rémunérée, dite aussi année sabbatique », nous rappelle Me Mounir Founani.

Ici, on évoque clairement l’échange de consentements entre les parties. En l’absence d’un texte express, le congé sans solde peut trouver une issue conventionnelle. Y compris dans le contexte actuel. Publié le 18 mars, un document du ministère du Travail indique d’ailleurs que l’employeur et le salarié « peuvent s’accorder » pour que ce dernier bénéficie « d’un congé additionnel non payé ».

Or, « s’il est imposé par l’employeur, cela pourrait traduire une modification unilatérale du contrat de travail, une pratique assimilable au licenciement abusif », note Me Founani. Dans certains cas, il peut même s’agir « d’une modification substantielle du contrat », enfonce Me Youssef Fassi Fihri, avocat au barreau de Casablanca. Car même en présence d’un accord, faut-il encore qu’il soit éclairé.

« Un congé permet, par définition, de prendre un repos sur une période déterminée. Même sans solde, il doit donc être délimité dans le temps. On ne peut pas parler d’un congé sans solde si sa durée n’est pas préalablement définie. Le salarié doit être en mesure de savoir ce sur quoi il s’engage. Sinon, quand bien même on recueillerait sa signature, celle-ci ne serait pas valable », explique Me Fassi Fihri.

Des mécanismes plus sûrs

Des éléments à prendre en compte. D’autant que l’absence de cadre légal peut inciter aux abus. « Des parties pourraient jouer sur ce vide juridique pour faire passer des accords avec les salariés, comptant sur la méconnaissance que ces derniers ont souvent de leurs droits. Ces accords, qui ne requièrent aucun formalisme particulier, sont invoqués par l’employeur en cas de litiges ultérieurs ». Absence d’un texte légal, oui, mais l’entreprise peut toujours avancer « que les obligations valablement formées tiennent lieu de loi entre les parties » (article 230 du DOC).

Le vide juridique est généralement facteur d’insécurité. Une denrée nécessaire dans ce contexte de grands bouleversements. D’où l’importance, pour les employeurs, de faire jouer les options prévues et encadrées par la loi. L’objectif est de protéger l’entreprise, sans léser ses employés.

« Compte tenu des circonstances actuelles et des mesures de prévention liées à l’état d’urgence sanitaire, l’idéal est d’activer les dispositions de l’article 185 du code de travail », préconise Me Youssef Fassi Fihri. Cet  article permet à l’employeur, « en cas de crise économique passagère », de décider la « réduction du temps de travail couplée à une baisse du salaire qui ne doit pas être inférieur à 50% du salaire normal. Cette période ne doit pas non plus excéder soixante jours, qui peuvent être répartis sur une année ouvrable à la guise de l’employeur », explique le juriste.

Ici, le législateur n’impose pas l’accord du salarié. « La décision définitive incombe à l’employeur qui doit préalablement consulter les délégués des salariés et, le cas échéant, les représentants des syndicats au sein de l’entreprise », rappelle Me Fassi Fihri. Mais au delà de soixante jours, « la réduction doit obligatoirement faire l’objet d’un accord avec ces entités ». A défaut d’accord, la réduction de la durée normale du travail ne peut être opérée que sur autorisation du gouverneur. « Dans les faits, cette autorisation est rarement délivrée », observe l’avocat.

 

Par : A.E.H
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Coronavirus. Urgence sanitaire: Le décret-loi et le décret publiés au B.O

Les textes législatif et réglementaire régissant l’état d’urgence sanitaires ont été publiés ce mardi au bulletin officiel.

Le décret-loi n° 2.20.292 édictant des dispositions relatives à l’état d’urgence sanitaire a été publié ce mardi 24 mars au Bulletin officiel. Ce texte offre un cadre légal général à l’état d’urgence sanitaire, applicable aujourd’hui et pour les situations futures.

Un deuxième texte, qui s’applique précisément au contexte actuel, a été publié au même Bulletin officiel. Il s’agit du décret n° 2.20.293 portant annonce de l’état d’urgence sanitaire sur l’ensemble du territoire national pour faire face à la propagation du coronavirus Covid-19, qui a lui aussi été publié à la même édition du B.O.

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